la France de 1939 à 1945 : articles en ligne
Etat d'esprit des Français en février 1944
REACTIONS DE L’OPINION DEVANT LES PROBLEMES DE L’HEURE
a) Le terrorisme et sa répression
Le terrorisme, hier encore, n’affectait qu’une portion restreinte du pays. Désormais il est partout, faisant, ici et là, diversement sentir le poids de sa présence.
Dans sa grande majorité, la population réprouve les attentats terroristes et souhaite le retour à l’ordre :
« La vigoureuse répression entreprise par les forces du Maintien de l’Ordre a vivement frappé les esprits. La très grande majorité de la population, quelles que soient ses tendances, enregistre avec une satisfaction évidente la diminution du nombre des attentats, souhaite une épuration rapide et le retour à une situation saine » constate le Préfet Régional de Clermont-Ferrand.
Et dans le même sens, le Préfet de l’Isère note « un dégoût certain et croissant des attentats terroristes qui s’en prennent aux biens comme aux personnes et dont l’opinion souhaite une répression vigoureuse ».
« De plus en plus, écrit encore le Préfet Régional de Toulouse, on déplore les attentats criminels et l’on souhaite que le Gouvernement puisse y mettre un terme ».
Mais l’opinion établit généralement une distinction bien nette entre les auteurs d’actes de banditisme, pour qui elle n’a que réprobation et sévérité, et les réfractaires ou « résistants » dont l’activité lui apparaît purement politique. A ces derniers vont toutes ses sympathies, à tout le moins son indulgence, d’où le caractère plus nuancé de la majorité des jugements portés sur l’action répressive entreprise par le Gouvernement. Citons notamment :
« Les opérations de Haute-Savoie sont diversement commentées. Pour les uns elles sont salutaires ; d’autres, non moins nombreux, désapprouvent les autorités françaises de venir en aide à l’Allemagne en combattant des Français ». (Jura)
« Les actes de terrorisme sont réprouvés par la majorité de la population, cependant l’opinion publique manifeste une certaine désapprobation des mesures prises pour y mettre fin. L’opération de police effectuée en Haute-Savoie a suscité de nombreux commentaires parfois défavorables. Certains pensent, en effet, que de telles opérations ne peuvent qu’engendrer la haine entre Français. (Isère)
« Dans sa majorité, la population estime que, seules, des méthodes énergiques peuvent venir à bout des exploits des fauteurs de troubles. Mais il reste encore des personnes, principalement parmi la classe ouvrière, qui accordent, sinon de la sympathie, du moins des excuses aux agissements des terroristes. (Puy de Dôme)
« La lutte contre le terrorisme est généralement approuvée dans les modalités actuelles ; cependant, la création des cours martiales reste contestée ». (Indre et Loire)
« La population a paru suivre avec intérêt les opérations entreprises en Haute-Savoie. On a remarqué, avec un certain soulagement, que les dispositions prises n’avaient entraîné qu’une faible effusion de sang ». (Seine)
Enfin, plusieurs Préfets notent une certaine réprobation à l’égard des opérations entreprises par les forces du Maintien de l’Ordre. Le Préfet de l’Allier constate que « les opérations entreprises par le Secrétaire Général au Maintien de l’Ordre sont accueillies avec réserve ». Et c’est encore le Préfet des Pyrénées-Orientales qui écrit : « Les opérations de police dirigées contre les réfractaires de la Haute-Savoie font l’objet de beaucoup de réticences et de critiques. Il serait bon que la presse et la radio donnent à la population de nouveaux apaisements sur la discrimination que le Gouvernement entend faire entre les simples réfractaires et les assassins. La participation de la Milice aux opérations en Haute-Savoie est vivement discutée. L’opinion admet que les forces de police soient chargées de ces expéditions ; elle comprend mal que des Français soient volontairement engagés dans une lutte contre d’autres Français ».
L’Ain a été le théâtre d’opérations menées par les troupes d’occupation. « Les mesures répressives effectuées dans le département par les troupes d’occupation, écrit à ce sujet le Préfet de ce département, ont plongé la population dans l’effroi ».
b) S.T.O.
L’hostilité au S.T.O. est générale. Toute mesure de recensement ou de réquisition de main-d’œuvre est accueillie avec méfiance et mauvaise humeur par la population, qui y voit moins une recherche véritable de main-d’œuvre qu’une intention délibérée de procéder à de vastes opérations de déportation.
Le recensement de la classe 1944 est considéré comme une mesure préliminaire à de nouveaux départs pour l’Allemagne.
Le fonctionnement des commissions de peignage promet des départs qui ne seront plus décidés en considération de l’âge, et donc, choquent le sentiment de l’équité si profondément caractéristique de la mentalité française.
Enfin, la loi récente sur l’organisation du travail, dans la mesure surtout où elle affecte la main-d’œuvre féminine, a vivement ému l’opinion. Ouvrons les rapports :
« La nouvelle législation relative à l’utilisation de la main-d’œuvre masculine, et surtout féminine, a provoqué une émotion profonde, que le recensement de la classe 1944 et l’appel aux Chantiers de Jeunesse n’ont fait qu’accroître ». (Puy de Dôme)
« La loi du 1er février 1944[6] est commentée avec la plus vive inquiétude dans tous les milieux. D’ores et déjà, il apparaît hors de doute que son application se heurtera à des difficultés considérables ». (Limoges)
c) Évacuation des côtes - Les récentes décisions des autorités d’occupation ont donné à cette question une ampleur considérable et une acuité telle que la vie de régions entières en est paralysée et que tout autre problème, toute autre préoccupation s’y trouvent momentanément relégués au second plan.
Les populations atteintes sont plongées dans la consternation et le désarroi car chacun préfère, à l’abandon de son foyer, le risque de bombardements et d’éventuelles opérations de débarquement. Aussi, les départs volontaires sont-ils relativement peu nombreux.
L’institution du régime de la zone occupée dans les départements méditerranéens a fait naître la crainte d’une mainmise plus étroite des autorités d’occupation sur leur activité.
d) Ravitaillement et coût de la vie
De nombreux rapports notent certaine résignation du public devant les difficultés du ravitaillement. Toutefois, l’aggravation de la situation au cours du mois de février, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en viande en produits laitiers et en matières grasses, a souvent provoqué des commentaires malveillants, tant à l’égard du Gouvernement que des troupes d’opérations : « Comme toujours, les difficultés du ravitaillement indisposent les Français et les troupes d’occupation » écrit le Préfet de la Vienne.
L’augmentation croissante du coût de la vie, étroitement liée à la question du ravitaillement, préoccupe vivement les couches de la population à revenus modestes et créé un malaise dont il serait dangereux de sous-estimer l’importance.
ÉTAT D’ESPRIT DES DIVERSES PARTIES DE LA POPULATION
Les rapports ne signalent pas, en général, de changements notables dans la mentalité des diverses couches sociales.
Classe ouvrière
La question des salaires n’a pas reçu la solution d’ensemble que réclament la quasi unanimité des Préfets, et qui permettrait de faire face à la montée croissante du coût de la vie donc d’assurer de façon plus satisfaisante le ravitaillement des familles ouvrières. La situation ainsi créée ne laisse pas d’être inquiétante. Jetant à nouveau le cri d’alarme, le Préfet Régional de Limoges la résume ainsi :
« La classe ouvrière, sourdement travaillée par la propagande communiste, demeure hostile à la politique gouvernementale dont elle prétend seule faire les frais. La question des salaires, qui est primordiale à ses yeux et n’a pas encore reçu de solution satisfaisante risque, si ses espoirs sont déçus, d’amener sous l’impulsion de meneurs encore dans l’ombre, des réactions brutales. Chez elle, l’opinion est à l’heure actuelle infiniment sensible ».
Paysans
La pénurie de main-d’œuvre et de chevaux va s’aggravant et pose au monde agricole des problèmes préoccupants.
La situation des agriculteurs des zone évacuées est particulièrement digne d’intérêt.
Dans l’ensemble, cependant, le paysan reste, dans la conjoncture présente, privilégié, et trop souvent « uniquement préoccupé de gagner de l’argent et de se soustraire aux impositions ».
Les chantiers de Jeunesse
Un peu d’histoire
En juillet 1940, la défaite de l’Armée française est totale, la Wehrmacht occupe le pays : l’armistice est signé depuis le 22 juin et la France est coupée en deux par la ligne de démarcation, entre zone occupée et zone libre. Il convient de traiter d’urgence le cas des hommes mobilisés dans les derniers jours de la débâcle, complètement abandonnés et livrés à eux-mêmes, sans aucune instruction militaire et dont le comportement commence à inquiéter le commandement. On procéderait ultérieurement à leur démobilisation.
A la demande du Maréchal Pétain, le général de la Porte du Theil, ancien scout, propose de créer des groupements de jeunesse en zone sud (puisque les Allemands les interdisent en zone Nord) et de leur donner, par une vie de travail rude en pleine nature, loin des villes, une formation morale et virile, toutes classes sociales confondues, sur la base d’un système mi-civil, mi-militaire. 250 000 jeunes pourraient, estime t’on, être formés en dehors du contrôle allemand. On regroupera ces hommes, puis on procédera à leur articulation en unités de 200 hommes environ. On les fera "camper en pleine nature, au milieu des bois, à l’abri de toute cause de trouble ou d’agitation’’ et on les occupera à de grands travaux d’intérêt général.
Les chantiers de jeunesse
Il est alors stipulé, par décret, que les hommes incorporés en juin 1940 et relevés de leurs obligations militaires seront aussitôt versés pour une durée de 6 mois dans ces groupements (constitués sous l’autorité du Ministre de la Jeunesse et de la Famille, pour éviter toute ambiguïté).
La mise sur pied se fait très rapidement ; pour faire simple, l’organisation est calquée sur celle de l’armée de terre. Pour l’encadrement on fait appel au volontariat : il y a de très nombreuses candidatures de cadres de l’armée d’active mais aussi de la réserve. La masse d’appelés est évaluée à 70.000 hommes mais finira par atteindre près de 87.000 hommes. Le premier camp est ouvert le 9 août ; fin 1940, il y en a 230 en zone libre.
Un commissariat général, basé à Châtelguyon (Puy de Dôme), coordonne six commissariats régionaux : Alpes-Jura, Auvergne, Languedoc, Pyrénées-Gascogne, Provence et Afrique du Nord. Chacun supervise une école de cadres et 8 à 10 groupements de 1500 à 2200 hommes. Chaque groupement, dirigé par un militaire au grade de colonel, est divisé en 6 à 12 groupes, de 150 à 200 hommes, disposant chacun d’un camp qu’il faut créer de toutes pièces dans une zone isolée et très souvent montagneuse (avec des paquetages sommaires et des toiles de tente, on commence par un camp de toile).
Chaque groupe est articulé en une dizaine d’équipes d’une quinzaine d’hommes, commandées, le plus souvent, par un appelé ayant fait un stage de qualification.
Le travail est considéré avant tout comme un outil éducatif. Il s’agit de produire en commun quelque chose d’utile au pays sans entrer dans des considérations de rentabilité : fourniture de bois de chauffage, de charbon de bois, construction de pistes et de chemins, initiation au travail du bois et du fer, à la maçonnerie... L’essentiel est la formation morale : elle a pour but de faire prendre conscience au jeune de ses devoirs d’homme et de ses responsabilités de citoyen.
Aucune "politique" n'est toléré dans les chantiers, ce qui signifie l'interdiction de la propagande des partis collaborationnistes et bien sûr des organisations de Résistance, mais aussi l'absence de radios, de débats et autres moyens de communication qui, même censurés, auraient permis aux jeunes de suivre l'évolution de la guerre et de la politique du régime, et de se faire une opinion personnelle.
Le 8 janvier 1941, les chantiers sont rattachés au secrétariat à l’Instruction publique. De six mois, le stage passe à huit et devient obligatoire pour tous les citoyens. Les jeunes de race juive en sont exclus à partir du 15 juillet 1942.
La tenue devait traduire des idées d’ordre, de correction, de discipline et donner l’impression d’élégante simplicité.
Pour les cadres : béret vert, chemise kaki, cravate verte, culotte de cheval claire ou pantalon de golf noir, blouson kaki clair ou beige, gants cuir fauve ou blanc.
Pour les jeunes : béret vert foncé, chemise kaki, cravate verte, pantalon golf, blouson avec ceinture de cuir fauve,
Insigne général des Chantiers de Jeunesse
A partir de novembre 1942, les Allemands occupent aussi la zone libre. En septembre 1943, ils réclament que les jeunes gens des Chantiers de Jeunesse soient envoyés en Allemagne. Pour échapper au S.T.O. (Service du Travail Obligatoire), beaucoup fuient vers les maquis et seulement 16.500 jeunes des chantiers de jeunesse seraient partis au S.T.O., soit 2,5% de l’effectif global.
Les C.D.J. seront dissous en trois étapes, en juin 1944 par les Allemands (les jeunes sont transférés à l’organisation Todt pour la construction du mur de l’Atlantique), le 5 juillet par le gouvernement d’Alger et le 13 décembre par le Gouvernement Provisoire de la République. Le temps de stage accompli obligatoirement dans l’organisation des chantiers de la jeunesse est compté comme une durée égale de service militaire.
On estime le nombre de personnes passées par les Chantiers entre 300 000 et 500 000. Début 1943, ils devaient disposer d'un effectif permanent de quelque 30.000 jeunes.
Le groupement de Bourg
46 groupements sont installés en métropole, numérotés de 1 à 47 (le 41 n’ayant jamais existé). Basé aux Vennes, à Bourg en Bresse, le groupement N° 3 s’appelle « De Bournazel » (Henry de Bournazel, 1898–1933, dit l'Homme Rouge, était un militaire français qui fit l'objet, dans les années 1930 à 1950, d'un véritable culte patriotique, devenant pour certains le modèle du jeune officier). Construit par ses soins, son Poste de Commandement est maintenant la chapelle des Vennes.
Il comprend 10 groupes (10 camps) situés à Chalamont (1), aux Rippes (2 et 7), à Simandre (3 et 4), à Chavannes (5), à la Tranclière (6), à Drom (8), à Ceyzériat (9) et à Pont d’Ain (10).
Le groupe 8 (Drom) se nomme aussi Gallieni. Il est doté d’un insigne représentant une flamme tricolore, sur un 8 renfermant 2 tentes et surmontant la devise « Jusqu’au bout ».
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