la Légion Etrangère
Le Bataillon de Marche du Dépôt de la Légion étrangère de Sathonay
Alors qu’au 15 juin 1940, la région lyonnaise est menacée par les troupes allemandes qui ont percé le front de l’Aisne et qui se ruent en direction du sud-est, les troupes françaises du XIVe Corps d’Armée sont misent en état d’Alerte.
Pendant que le XVE Armee Korp du Général HOEPNER, représentant une force de 30 000 hommes et d’environ 250 à 300 blindés, se dirigent droit sur Lyon, le Dépôt de la Légion étrangère de Sathonay forme un bataillon de marche qui est intégré au Groupement du Rhône du Général CARTIER chargé de barrer la vallée du Rhône aux Allemands alors que l’Armée des Alpes du Général ORLY combat les Italiens à la frontière.
Les Légionnaires du bataillon de marche sont issus à la fois des éléments des Compagnies de Passages et d’Instructions du dépôt de la Légion étrangère cantonnant dans les environs du Camp de La Valbonne et renforcées d’un escadron de Légionnaires qui était en attente à la Caserne Part Dieu, coupé de son unité et versé au bataillon de marche.
Du point de vue du matériel et de l’armement, le bataillon est le rflet de toutes ces troupes organisées dans l’urgence en ce mois tragique de juin 1940. Ayant reçu un minimum d’instruction militaire, seuls avec leur fusil et quelques grenades, avec peu de munitions, soutenu par quelques mitrailleuses et n’ayant aucun canon antichars, les anciens ainsi que les nouveaux Légionnaires forment un bataillon de 600 hommes répartis en :
4 compagnies de fusiliers-voltigeurs,
1 section de mitrailleuses,
1 escadron de cavalerie.Dès le 16 juin, le bataillon, dont le poste de commandement est situé dans l’enceinte du Camp de Sathonay, occupe et organise ce sous-secteur qu’il doit défendre. Ce dernier, situé à l’extrémité ouest du Groupement du Rhône du Général CARTIER, barre l’accès nord de Lyon, en avant du Plateau de la Croix Rousse, entre la Saône et la Rhône. Les Légionnaires dressent des barricades barrant les voies d’accès principales en direction de Lyon :
Sur la rive gauche de la Saône suivant la RD433,
Sur la RN83,
En avant de la Croix Rousse.Un détachement de Légionnaires passe le Saône à Neuville pour se rendre à Chasselay et y organiser défensivement le village. Ils sont relevés le soir même par une compagnie du 25eRégiment de Tirailleurs Sénégalais (25e RTS) faisant partie du Groupement du Général de MESMAY chargé de barrer la route à l’ennemi en avant des Mont d’Or sur la rive droite de la Saône jusqu’à Tarrare. Ces Légionnaires vont occuper ensuite le pont de Neuville-sur-Saône au côté des Sénégalais du 25e RTS.
Le 17 juin, alors que le Maréchal PETAIN lance sur les ondes « qu’il faut cesser le combat… » et que les unités de défense anti-aérienne de Lyon se replient devant l’avance allemande, la 252ebatterie du 405e Régiment de DCA est envoyée en soutient aux Légionnaires. Le lendemain, quatre canons de 47mm antichars et leurs servants issus du dépôt d’artillerie de Grenoble, sont mis à la disposition du bataillon de la Légion.
Mais Lyon a été déclarée « ville ouverte » pendant la nuit du 17 au 18 juin ce qui désorganise complètement la défense ouest de la vallée du Rhône. Il ne doit y avoir aucun combat dans la cité et les ponts de la ville ne doivent pas être détruits. Le Général CARTIER replie ses troupes et forme une nouvelle ligne de défense en avant de Grenoble et sur la rive gauche de l’Isère pendant que quelques unités se positionnent aux sorties sud de Lyon.
Seules les troupes du Général de MESMAY en liaison avec le bataillon de marche de la Légion, mis à sa disposition, restent sur leurs positions au nord de Lyon. Comme pour les Tirailleurs du 25e RTS, les Légionnaires du bataillon de marche du Dépôt de Sathonay reçoivent la mission de ralentir au maximum l’entrée des Allemands dans Lyon afin que les autres unités du Groupement CARTIER puissent gagner leurs nouvelles positions tout le long de l’Isère.
Lorsque le 19 juin 1940 à 9h30, la colonne allemande formée par le régiment d’infanterie « Grossdeutschland » entre au contact du 25e RTS sur la rive droite de la Saône, les compagnies du bataillon de marche de la Légion se répartissent ainsi :
Une compagnie + un peloton de l’escadron de marche :o – Fontaines-sur-Saône, Rochetaillée et Neuville-sur-Saône,
Une compagnie : Rillieux-la-Pape,
Un peloton : Crépieux,
Une compagnie : Sathonay village,
Une compagnie : Caluire
Un peloton en réserve au PC au Camp de Sathonay.Les mitrailleuses de la Légion sont réparties sur les différentes barricades. Les quatre canons de 47mm sont répartis en deux sections de deux pièces aux barricades de Fontaines-sur-Saône et de Caluire tandis que la batterie du 405e de DCA a deux pièces positionnées sur la route Caluire/Fontaines et deux autres sur la route Caluire/Rillieux. Aux côtés des Légionnaires se trouvent également des hommes du 342e Régiment de Défense Passive de Lyon (ex 142eRégiment Régional).
Alors que les combats entre les Sénégalais et les Allemands de la « Grossdeutschland » font rage sur la rive droite de la Saône, les Légionnaires qui devaient défendre Neuville-sur-Saône évacuent leur position, sur ordre, à 11h00. A midi, la seconde colonne du régiment « Grossdeutschland », formée par le IIe bataillon du IR « GD » suit la rive de la Saône, entre dans la localité sans combattre à la grande surprise du 25e RTS qui a maintenant son flanc droit à découvert.
De plus le pont de Neuville n’ayant pas sauté, la colonne ennemie poursuit sa route en direction de Lyon laissant le soin à une autre troupe de réduire la résistance du quartier du Villevert, sur la rive droite de la Saône.
La tête de colonne allemande tombe sur la barricade de Rochetaillé mais celle-ci est prise sans combat car l’arrivée de l’ennemi a surpris le détachement formé certainement de jeunes recrues. Elle reprend sa route en direction de Lyon et est stoppée à 13h30 par la barricade de Fontaines-sur-Saône où la résistance des Légionnaires est vigoureuse. Les Allemands perdent alors au moins un homme alors que la Légion étrangère a trois tués.
A 14h50, de l’autre côté du sous-secteur de Sathonay, sur la RN83 à Rillieux-la-Pape, une reconnaissance allemande vient buter sur la barricade tenue par les Légionnaires. Un motard allemand aurait été blessé et fait prisonnier. La reconnaissance ennemie n’insiste pas et reste en arrière de Rillieux jusqu’au milieu de l’après-midi où elle repart vers le nord.
Sur la rive gauche de la Saône, après avoir passé Fontaines-sur-Saône, la colonne du II/IR « GD » reprend sa progression en direction du plateau de la Croix Rousse en longeant le Camp de Sathonay, où vers 14h00, elle essuie les tirs des Légionnaires occupant les lieux. Mais ne s’attardant pas, la colonne continue sa route et atteint la barricade de Caluire. La fusillade éclate et les coups de canons éclatent aussitôt de part et d’autres mais les Légionnaires ne peuvent rien contre un ennemi supérieur en nombre et en matériel. L’officier de la Légion est blessé et cinq artilleurs sont tués. A 15h00 les combats cessent.
A 16h10, les Allemands entre dans la Préfecture de Lyon, toute résistance est devenue maintenant inutile. Déjà vers 15h00, les commandants des compagnies tenant les barricades de Sathonay village, Rillieux-la-Pape et Crépieux ont reçu l’ordre de se replier pour la fin de l’après-midi. Passant sur l’autre rive du Rhône, les survivants rejoignent les éléments du dépôt qui se sont replié le matin même sur St Priest et Heyrieux.
Le bataillon a perdu près de la moitié de son effectif. Beaucoup de Légionnaires sont prisonniers tandis que d’autres vont errer et se cacher dans Lyon et les campagnes alentours. Des Légionnaires n’ayant pas été capturés se replient vers le sud en suivant le Rhône. Une poignée de Légionnaires va rester à St Priest pour participer à sa défense le lendemain 20 juin tandis que le reste du bataillon et les éléments du dépôt vont transiter par Grenoble, rejoindre Aix-en-Provence et arriver à Fuveau le 25 juin 1940 au moment de l’armistice.
par LAINE Frédéric
membre de Mémoires de l’Ain 39-45
http://fredlaine01.wordpress.com/